It's more than music [Alaska & Regan]

Agenouillée devant la bécane que Francis t'a demandé de vérifier, tu soupires lourdement. Sérieusement, c'est quoi ces abrutis qui ont de si belles motos mais qui n'en prennent pas soin ? Ah ces riches ! Ça risque de lui coûter cher... Tant pis pour lui, la prochaine fois il fera plus attention. Tu te relèves lentement, soupires encore et essuie tes mains pleines de cambouis, un combat peine perdu puisque tu sais qu'elles resteront noire au moins jusqu'à ce que tu prennes ta douche. D'un pas nonchalant, tu retournes voir le client afin de lui annoncer que la note va être plutôt salée. « Bon. Vous allez devoir dépenser un peu. Votre bécane risque pas de démarrer vu dans l'état où elle est. » Lui annonce-tu. Il n'a pas l'air bien enchanté par cette nouvelle. Tu t'en fous, c'est pas ton problème, c'est pas toi qui l'a cassé sa moto. Rapidement, tu lui expliques ce qui ne va pas, ce qu'il faut changer, réparer. Mais il semble perplexe. Soudain, il se tourne vers ton oncle et lui demande si c'est lui qui va faire les réparations. Nouveau soupire de ta part. Mark se contente de hausser les épaules en souriant. « Hé oh ! C'bon m'sieur le macho ! Je sais tout aussi bien rafistoler les bécanes que lui ! Z'aviez qu'à en prendre soin si vous ne vouliez pas qu'une "gonzesse" s'en occupe. » T'es cassante, froide, sans filtre mais pas agacée. Tu sais pas vraiment mettre les formes. Et puis pourquoi faire ? Il l'a mérité ce riche macho à deux francs cinquante. Il grogne, bougonne, mécontent. Pourtant, il semblerait que tu l'ais convaincu puisqu'il accepte de te laisser son "bijou" comme il l'appelle. Après quelques papiers, il déguerpi enfin. Quel boulet celui là ! Le reste de la journée passe bien vite et voilà qu'il est déjà dix-huit heures. C'est avec Frank que tu rentres. Tu passes d'abords embrasser ta grand-mère. Et puis après vingt minutes de discussion intense, tu finis par traverser la rue. Que le chemin fût long pour arriver chez toi ! Tu ironises souvent là dessus, sur la proximité avec ta famille. Mais cette ironie cache un vrai désire de partir, de t'émanciper, de vivre ta vie tout simplement. Mais passons ! Tu n'as pas vraiment le temps de penser à tes petits tracas. L'heure tourne et ce soir, tu vas voir Sweet Disaster. Ce n'est pas la première fois que tu vas assister à l'un de leur concert, bien au contraire même. Tu es une récurrente, toujours assise au fond de la salle avec un milkshake vanille. Parfois tu emmènes Jason ou Skye qui sont toujours contents de passer du temps avec leur grande soeur. Tu as même réussi à sortir Freddy une fois. Cependant, ce soir tu y vas seule. Il te faut bien une heure pour que tu sois totalement prête. Maquillée légèrement, tes cheveux sont lâchés. Tu n'as pas fait un effort spécial pour tes fringues non plus, ta robe noir un peu cintrée ira parfaitement. De toute façon, au fond personne ne te remarque, personne ne te voit et tu t'en accommode bien. Pour cette fois, tu prétextes une soirée bidon entre potes. Ouais, tu sais que si tu dis à ton père que tu vas encore au Nectar's, il va vraiment finir par se poser des questions. Tu arrives dans le fameux restaurant américain un peu avant vingt heures. Sans rien changer à tes habitudes, tu t'assieds à cette table, celle qui est la plus reculée sur le côté gauche de la salle. Tu commandes le dit milkshake vanille et attends sagement que ça commence. C'est là, cinq minutes à peine après que l'on t'ai servi, qu'ils montent sur scène. Comme le reste des individus présents, tu les applaudis. Elle est là, toujours derrière son synthé. T'aimes ce qu'elle fait. Il faut l'avouer, elle est douée. Elle, c'est Alaska Lewinski. Tu as toujours été dans les mêmes établissements scolaires de cette fille. Pourtant, tu lui as rarement parlé. Au lycée, tu essayais de l'éviter. Elle n'a pas de problème de communication et toi t'es maladroite, tu sais pas vraiment y faire avec les autres, tu sais pas mettre les formes, tu fais pas attention à ce que tu dis, c'est plus fort que toi. Alors ouais, tu l'évitais, n'ayant pas envie d'être ridicule, pas devant elle. Parce qu'elle, elle t'obsède depuis le début du lycée justement. Parce que c'est presque maladif. Tu l'admires, elle est ce que tu n'es pas, extravertie, sûre d'elle, drôle. Belle. Le concert est fini, il est temps pour toi de partir. Tu n'es jamais restée après. Question d'habitude encore une fois. Et puis, qu'est-ce que tu ferais assise seule, ta coupe de milkshake vide devant toi ? Tu ne perds pas une minute et te lève pour aller payer au comptoir. 3$25, rien de bien excessif. N'ayant qu'un billet de dix, tu attends patiemment que l'on te rende la monnaie. Ce gamin à la caisse doit être nouveau, tu ne l'as jamais vu avant. D'ailleurs, tu doutes de son efficacité. Mais toi, t'es patiente alors tu t'en fiches, qu'il prenne son temps si ça lui chante.

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La musique a toujours été pour toi, Alaska un peu comme une addiction. Tu peux remercier ta mère pour t'avoir transmis cette drogue si plaisante qu'est de pouvoir jouer du synthé au minimum six fois par semaine. Tu essayes de jouer tous les jours, même lorsque tu n'as pas de répétition avec le groupe, pas parce que tu as besoin de t'entraîner (bien que ça ne face jamais de mal) mais parce que tu as besoin de sentir tes doigts caresser les touches de ton instrument. C'est comme une bouffée d'oxygène, comme un shoot de morphine, un rail de cocaïne, il n'y a rien de tel pour te remettre d'aplomb après une sale journée. Et même si tes frères et sœur n'ont pas envie de t'entendre, et bien, ils n'ont pas vraiment le choix parce que tu joues sans même te soucier de qui peut t'écouter. Ton père ne peut pas râler, il n'est pas assez souvent à la maison et ta mère est tellement fière que tu aies repris le flambeau qu'elle ne te dira jamais rien. Bon, faut avouer que maman Lewinski aurait sans doute préféré que tu continues le piano classique et que tu ne te tournes pas vers le synthé, mais que peut-on faire face à un sourire comme le tiens ?

Running with the Wolves en fond dans la voiture, tu es en voiture pour rejoindre ta meilleure-amie, son frère et votre batteur tout en essayant d'appeler Cléo. Tu ne l'as pas vue avant de partir et comme depuis quelque temps, tu essayes de lui parler tous les jours de l'école. Elle s'ouvre de moins en moins, reste trop souvent dans son coin et tu as la mauvaise impression qu'il y a quelque chose qui se passe mal. Tu sais que ton frère, James, peut veiller sur elle puisqu'il est surveillant dans son lycée. Mais, ce sont peut-être des problèmes de fille et elle aurait peut-être plus de facilité à se confier à toi ? Néanmoins jusque maintenant rien n'y a fait. Mais faut dire que toi, qui n'as jamais eu de mal à communiquer avec qui que ce soit, tu te sens totalement dépourvue face à ta petite sœur... Tu as l'impression de ne pas savoir lui parler, que tout ne mènes à rien.
Et pourtant, dieu sait que tu as su tirer les vers du nez à des gamins plus timides qu'elle. Que tu as réussi à trouver des amis à ceux qui semblaient pourtant vouloir rester dans leurs coins... Tu as toujours pris ton job très à cœur au lycée en faisant partie du comité d'accueil. Alors, tu as rapidement appris à parler à tout le monde sans jamais juger les origines, le style vestimentaire ou même les goûts d'une personne. Il y a du bon en chacun et il y a surtout beaucoup de choses à apprendre chez chacun.

- Ouais, Cléo ? C'est Alaska, Bah, je voulais juste savoir comment s'était passée ta journée, j'ai des trucs à te raconter avec la boutique ! Bon, bah, on verra si tu es toujours debout quand je rentre, bisous ma belle.
Elle n'a pas répondu et quand tu vérifies l'heure, tu te dis qu'elle est peut-être en train de prendre une douche. Dans un soupir à fendre l'âme, tu jettes ton téléphone sur le siège passager tout en râlant. Tu aurais vraiment aimé pouvoir lui parler. Tu aurais aimé qu'elle te dise quelque chose. Et tu jures, Alaska que si elle avait décidé de s'ouvrir à toi alors que tu étais en route pour un concert, tu aurais annulé pour rentrer à la maison et l'écouter. La musique, c'est ta passion numéro un, mais il n'y aura jamais rien de plus important que ton frère et tes soeurs.


Deux petites heures plus tard, il est vingt heures et votre concert annonce son début. Tu sens ce stress si familier traverser tes veines en même temps qu'une vague d'excitation. Tu as l'habitude de performer sur cette scène, c'est un peu comme si vous étiez à la maison, mais chaque fois, c'est le même stress, un public qui diffère et des chansons similaires.
Pourtant, cette fois, tu reconnais un visage dans la foule lorsque tu la caresses du regard. Tu n'as pas le temps de t'attarder sur son visage plus longtemps qu'une poignée de seconde, mais tu la reconnais. Une blonde que tu as déjà vue plus d'une fois à vos concerts, mais qui disparaît juste après sans même prendre le temps de profiter de la chaleur du bar. Fitz n'est pas présent, mais tu espères qu'il le sera au prochain. Tu l'aimes bien. Il est vachement sympa et il a de la conversation. Tu as appris pas mal de trucs la dernière fois sur le métier de vétérinaire.

La musique transcende tout ton corps. Durant une heure, vous essayez de donner à votre publique tout ce que vous ressentiez. Tu ne cesses d'avoir des jeu de regard avec ta meilleure amie et le reste du groupe, tout autant qu'avec ceux qui vous écoutent et qui aime votre musique. Car tu sais que sans personne pour vous écouter, vous n'en seriez pas là, à vous produire sur une scène de bar, aussi petite soit-elle.
Mais, il y a toujours un moment où ça se termine et lorsque vous faites un salut au reste de la salle, tu remarques que cette fois la blonde est toujours là alors, une fois n'est pas coutume, tu assures à ton groupe que tu reviens et tu demandes à Charlie de s'occuper de ton synthé le temps que tu reviennes. Tu te frayes un chemin à travers le bar pour arriver juste derrière la blonde. Tu sembles aussi la reconnaître du lycée, mais ça t'intrigue de savoir pourquoi elle ne reste jamais ici, pour profiter de la bonne ambiance.

Tu te racles la gorge et tu attends qu'elle se retourne vers toi avec un sourire.
- Hey ! Je crois qu'on se connaît du lycée, non ? Ton visage me dit quelque chose... Et puis, je te vois souvent ici pendant nos concerts, mais c'est bizarre, j'ai l'impression que tu ne restes jamais ?